Qu'est-ce que le "KITA"

Qu'est-ce que le "KITA"

Le tissu kita : un symbole vivant de l’héritage africain
Le tissu kita, également appelé kente (ou kenten en akan, signifiant « panier tissé »), est l’un des textiles traditionnels les plus emblématiques d’Afrique de l’Ouest. Originaire du Ghana, plus précisément du peuple Ashanti, et également très présent en Côte d’Ivoire parmi les Baoulés, le kita incarne un riche patrimoine culturel, historique et symbolique. À travers ses couleurs éclatantes, ses motifs géométriques distinctifs et ses techniques de tissage minutieuses, le kita est bien plus qu’un simple tissu : c’est une véritable langue visuelle, un code identitaire et un porte-voix de l’histoire et des valeurs africaines.
1. Origine et histoire du kita
Le kita trouve ses racines dans les royaumes anciens d’Afrique de l’Ouest, en particulier dans l’empire ashanti du Ghana et chez les Akan. Selon la légende, deux jeunes tisserands ghanéens, inspirés par les toiles d’araignée, auraient inventé le tissage du kenté après avoir observé la complexité des fils tissés par une araignée. À l’origine, ce tissu était réservé à la royauté et aux dignitaires. Il servait lors des grandes cérémonies, des rituels et des moments clés de la vie du peuple. Le kita représentait le pouvoir, la noblesse et la sagesse.
2. Signification symbolique du kita
Chaque motif et chaque couleur du kita porte une signification précise. Le tissu parle un langage codé, et chaque combinaison raconte une histoire ou exprime une valeur :
·       Noir : maturité, spiritualité, lien avec les ancêtres.
·       Rouge : sacrifice, lutte, force.
·       Jaune / Or : richesse, royauté, prospérité.
·       Vert : fertilité, croissance, renouvellement.
·       Bleu : paix, harmonie, amour.
·       Blanc : pureté, initiation, célébration.
·       Motifs : ils représentent des proverbes, des symboles adinkra, des qualités humaines, des événements historiques ou sociaux.
Chaque pièce de kita est donc une expression narrative et artistique, une mémoire textile transmise de génération en génération.
3. Le processus de fabrication
Le kita est tissé à la main, selon une méthode complexe et artisanale. Les tisserands utilisent des métiers à tisser horizontaux traditionnels, souvent en bois. Le tissu est fabriqué en bandes étroites (de 10 à 15 cm de large) qui sont ensuite assemblées pour créer une pièce complète. Ce processus peut prendre des jours voire des semaines, selon la taille et la complexité des motifs.
Il faut non seulement une maîtrise technique, mais aussi une créativité artistique, car chaque tissu doit équilibrer formes, couleurs et significations. Dans certaines familles, le savoir-faire est transmis uniquement aux garçons ou dans une lignée de tisserands.
4. Le kita dans les cultures Akan et Baoulé
Chez les Ashanti du Ghana et les Baoulés de Côte d’Ivoire, le kita a une valeur sacrée et cérémonielle. Il est porté lors :
·       Des mariages traditionnels
·       Des funérailles royales
·       Des investitures de chefs
·       Des festivals culturels (comme l’Akwasidae ou l’Abissa)
·       Des cérémonies d’initiation
Il représente l’autorité, le respect, l’identité ethnique et l’ancrage ancestral. Porter un kita lors de ces événements, c’est affirmer son appartenance à une culture, son respect des aînés, et sa conscience de l’histoire.
5. Le kita dans la société contemporaine
Aujourd’hui, le kita connaît un renouveau et une mondialisation. Il inspire les stylistes, créateurs de mode, artistes, décorateurs et militants de la diaspora africaine. On le retrouve dans :
·       La haute couture (à Paris, Milan, New York)
·       Les tenues d’apparat modernes (vestes, robes, chemises, sacs…)
·       Les décors d’intérieur (coussins, tentures)
·       Les manifestations culturelles panafricaines
·       Les tenues d’universités lors des cérémonies de remise de diplôme dans la diaspora noire
Le kita est ainsi devenu un symbole de fierté africaine, d’héritage culturel et de résistance identitaire face à l’uniformisation globale. Il incarne une africanité assumée et réinventée.
6. Le kita comme outil de transmission
Le tissu kita est également un vecteur éducatif. Il permet d’enseigner :
·       L’histoire des peuples africains
·       Les valeurs morales et spirituelles
·       Les arts traditionnels et la créativité
·       La philosophie des symboles africains
Certaines écoles et universités africaines l’utilisent comme support pédagogique dans l’enseignement de l’art, de la culture, et de l’histoire africaine précoloniale.
7. Le kita et l’économie locale
La production et la vente du kita font vivre des milliers d’artisans en Afrique de l’Ouest. Il représente un enjeu économique et un levier de développement local :
·       Création d’emplois artisanaux
·       Transmission de savoir-faire
·       Tourisme culturel
·       Exportation vers les diasporas
La valorisation du kita, à travers des labels de qualité ou des initiatives de commerce équitable, permet également de lutter contre la contrefaçon industrielle (notamment les copies faites en Chine).
8. Le kita et l’identité panafricaine
Dans les milieux panafricanistes et afro-descendants, le kita est un emblème fort. Il est porté comme un acte politique et culturel, affirmant la reconnexion à l’Afrique, la fierté noire et la résistance face à l’héritage colonial et raciste.
Il est souvent arboré lors de journées telles que :
·       Le Black History Month
·       La Journée de l’Afrique
·       Les manifestations en faveur des droits des Noirs
Conclusion
Le tissu kita est bien plus qu’un tissu coloré. C’est un patrimoine vivant, une œuvre d’art textile, un langage, un message et un symbole. À la croisée de l’histoire, de la spiritualité, de l’art et de l’identité, il continue d’inspirer et d’unir. En portant le kita, on ne se pare pas simplement de beauté : on revêt l’histoire d’un peuple, la mémoire d’un continent, et la force d’un héritage enraciné dans la dignité.

 

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